Arts plastiques

Niveau 3è - Projet 5 "Autoportrait" partie 2

Par CLAIRE MINARET, publié le mercredi 6 mai 2020 11:05 - Mis à jour le dimanche 10 mai 2020 18:56
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Suite de la séquence "JE est un autre"

Bonjour à tous,

avec un peu de retard, voici la 2ème partie du cours sur "Portrait et autoportrait dans les Arts Visuels".

Cette seconde partie traitera plus particulièrement de l'Autoportrait dans l'Histoire des Arts en peinture et dans les Arts Contemporains.

Un sujet pratique y est associé, une manière d'approfondir la représentation de soi.

Bonne lecture ! Comme pour le cours précédent, vous ne recopiez dans le cahier que les parties en vert cette fois-ci  (le bleu est réservé aux liens hypertexte)

[ Plusieurs textes de ce cours sont extraits du site : http://histoiredarts.blogspot.fr/p/lautoportrait-recapitulatif.html ]

1 - Définition de l'autoportrait.

L'autoportrait est une représentation de soi-même : l'artiste montre comment il se voit.

Connu depuis l’Antiquité, ce - genre pictural n'existe qu'à partir du 15è siècle. Auparavant, le peintre se représentait au milieu d'autres personnages ou caché dans la scène. Il s'agissait d'une sorte de  signature.

2 exemples célèbres :

Les Noces de Cana (1563) (conservé au Louvre) avec l'autoportrait du peintre italien Véronèse (1528-1588) :

voir le tableau complet

 

 

 

 

 

 

 

Les Epoux Arnolfini (1434) avec l'autoportrait du peintre J. Van Eyck dans le médaillon miroir "incrusté" :


 

 

 

 

 

- le peintre apparaît en bleu, en miniature, dans le miroir pendu au fond de la pièce.

2 - L'invention d'un nouveau genre pictural.

Progressivement, le peintre perd son anonymat et devient reconnaissable.  Au 15ème siècle, la découverte de nouvelle techniques comme celle du miroir de verre, permet à l'autoportrait de s’imposer. Le sujet était pratique, car il ne nécessitait pas la présence de modèle. Ce genre pictural s’impose à la Renaissance grâce au courant de pensée humaniste , qui modifie les conceptions de l’Homme et ses rapports au monde. L’artiste acquiert un nouveau statut social. Il se représente seul sur le tableau, qui devient le témoignage de sa place dans la société. La Renaissance s’intéresse à l’homme. En plus de représenter son statut social, le peintre va peu à peu exposer une partie de sa personnalité. Il va, par des attributs ou des déguisements, faire passer des messages sur son image. C’est le cas dans l’autoportrait de Dürer datant de 1500 (à gauche), il s'identifie au créateur à travers la figure du Christ. Il affirme ainsi la noblesse de son travail et sa fonction « sainte » de créateur. Le peintre allemand Dürer est l’un des plus grands représentants de l’autoportrait. 

Autoportrait à 28 ans, huile sur bois
peinte en 1500, 66,3 × 49 cm, exposé aujourd'hui à la Alte Pinakothek de Munich en Allemagne

et  autoportrait de 1497 : Dürer ne se représente pas comme un simple artiste de province mais comme un aristocrate digne et paisible, habillé dans de beaux vêtements.

3 - Autoportrait intérieur.

L’autoportrait va rapidement devenir un outil d’introspection pour le peintre.

Au 17ème siècle, la série d’autoportraits de Rembrandt peinte entre ses 22 ans et les quinze jours précédents sa mort ressemblent à une analyse de sa vie. Tous les détails narratifs du tableau sont supprimés (fond neutre) au profit de l’expression du peintre, reflet de sa vie intérieure. Ces portraits « de lui-même », comme on disait à l’époque car le terme « autoportrait » n’existait pas, ressemble à un journal intime : un peintre communiquant avec lui-même à travers sa peinture (revoir ces autoportraits dans le cours précédent si nécessaire).

Exemples :

- à la fin du 19ème siècle, les célèbres autoportraits de Vincent Van Gogh fonctionne de cette manière : il explore son identité intérieure entre 1887 et 1889. Ses choix de couleurs reflètent souvent ses émotions intérieures, notamment lors des ses épisodes dépressifs (il y a un hyperlien sur l'image ci-après, avec un focus sur "l'Autoportrait à l'oreille bandée").

A la même époque, Paul Gauguin peint son "Autoportrait au Christ jaune", qui dévoile différents traits de sa personnalité (idem pour l'hyperlien sur l'image).

 

 

 

 

 

 

Près de deux siècles plus tard, Norman Rockwell fera lui aussi un triple autoportrait "racontant" son identité.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

N. Rockwell, Triple autoportrait, 1960, 113,5cm x 87,5cm. Huile sur toile

L'autoportrait est en effet dès la fin du XIXème siècle l'occasion pour le peintre de raconter son histoire où  du moins une partie. Ils utilisent, pour certains, tout comme le faisaient les peintres du 14eme siècle, des symboles pour se personnifier. Le but n'est plus de dépeindre leur statut social comme le faisaient leurs prédécesseurs mais de dévoiler une partie intime de leur vie ou de leur personnalité. Ces symboles représentent davantage l'état émotionnel où le récit anecdotique de leur vie d'artiste plutôt que l'image qu'ils souhaitent laisser derrière eux.
Ainsi les autoportraits de Frida Kahlo, dont vous aurez peut être parlé dans votre cours d'Espagnol (toujours un hyperlien sur l'image pour approfondir les références)..

 

 

 

 

4 - Autoportrait et exercice de style.

Durant le 20ème siècle, les autoportraits vont, pour certains, se détacher de la représentation réaliste. La série d'autoportraits de Pablo Picasso n'est pas seulement témoin du temps qui passe mais c'est le (moyen pour l'artiste d'expérimenter différentes techniques picturales).

Les autoportraits de Picasso de sa période cubiste apparaissent non plus comme la représentation physique du peintre ni même comme la représentation expressive de ses sentiments. Ils sont le support d’une idée picturale, d’un message abstrait.

 

 

 

 

 

Dans le portrait de 1938, Picasso se représente à la fois de face (les yeux) et de profil. L’idée exprimée ainsi est peut-être celle du dédoublement, et de la double signification des autoportraits : à la fois introspection du peintre et image donnée par le peintre de lui-même au spectateur.

Dans celui de 1929, Picasso se représente en ombre de profil, mangé par le visage monstrueux d’une femme ogresse. Il propose une vision intouchable, presque inexistante de lui-même. Il a perdu ici son enveloppe corporelle et semble n’être qu’une pensée, un souvenir.

A travers ses différents autoportraits et leur évolution, on remarque que cette représentation picturale, même si elle est prétexte à toutes sortes d’exercices stylistiques,  reste à la fois le miroir du peintre tel qu’il se voit et le miroir du peintre tel qu’il souhaite être vu.

5- l'Autoportrait dans les Arts Contemporains ( de 1960 à nos jours).

L'histoire du 20è siècle continue de modifier le rôle de l'Art dans la société. La recherche constante de modernité (faire en Art ce qui n'a encore jamais été fait avant) et les bouleversements liés au 2 guerres mondiales ainsi que l'essor du progrès technologiques poussent les artistes à chercher sans cesse de nouvelles formes d'expression.

La représentation de soi n'y échappe pas. La violence des 2 conflits mondiaux poussent par exemple les artistes à se montrer sous une forme fragilisée. Déformé, en souffrance, malmené, on est loin des autoportraits montrant l'artiste en gloire, cherchant à montrer sa réussite pour la postérité.

Les recherches formelles vont plus loin, jusqu'à "détruire" l'unité de la représentation.

Exemple 1 : Francis BACON, Selfportrait, 1971,

"Selfportrait est une Huile sur toile du peintre Francis Bacon (35,5 x 30,5 cm) exposé à Paris au Centre Georges Pompidou. Ce tableau représente donc le peintre, tel qu’il se voit de l’intérieur, avec son sentiment de mal être. La tête est disproportionnée par rapport aux épaules qui semblent très frêles. Au premier plan, on voit donc une figure déformée, en gros plan. Elle occupe tout l’espace. Avec ses grands aplats de couleurs sombres (noir, gris, vert , rouge et orangé) cernés par un fond noir qui contraste, il heurte le regard. Impossible de distinguer les traits du visage tant les contours sont flous, torturés, sinueux. L’artiste perd son identité en même temps que son visage. Pourtant, il s’agit bien d’une figure humaine, torturée par le mouvement, déformée et qui occupe tout l’espace. De temps en temps on croit distinguer un élément qui se fond aussitôt dans une masse informe, comme agitée par des émotions trop fortes. La lumière laisse une partie du visage dans l’ombre, comme si le modèle avait laissé derrière lui une part de son humanité ; comme si le peintre voulait cacher aux autres son côté sombre, ses pensées secrètes, et ne laissait affleurer que des émotions qu’il ne peut contenir. Les traits torturés créent de la violence. L'artiste malaxe la chair pour en faire jaillir les émotions, la souffrance de son moi intérieur. Le spectateur est alors mal à l’aise devant cette masse informe." extrait en provenance de ce site.

 

 

La problématique de la société de la consommation est aussi questionnée dans ces autoportraits "poubelles" de l'artiste français ARMAN (exemple 2) :

"Autoportrait Robot d'Arman est une œuvre de 1992 au format vertical et en 3 dimensions présentée comme un tableau, mais qui n’en est pas un au sens traditionnel du terme.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Arman a décidé de se représenter avec des objets personnels divers accumulés et assemblés qui "parlent de lui" sans réellement se montrer. Il recouvre ensuite tous ces objets hétéroclites d’un plexiglas (120 X 90 X 24,5 cm).

Les objets n'ont pas été placé de façon aléatoire, Arman à voulu établir un équilibre visuel en jouant sur les ombres et les contrastes. On peut donc y voir des pinceaux, des livres, un masque de plongée, un appareil photo, un violon, des pochettes de disque, un pistolet, une raquette de ping-pong, un arc, une bouteille de vin, un téléphone, des boites de médicaments.

Tous ces objets sont censés refléter la vie de l’artiste : son quotidien (prise de médicaments), ses goûts (montre, stylos, armes, masque africain "Arman était un collectionneur d'Art Africain"), ses loisirs (la peinture, la lecture "en particulier, les livres d'art", la musique, la photographie, le ping-pong, le tirc à l'arc), etc... Tous "ses" objets prélevés dans la vie quotidienne de l'artiste, permettent un portrait assez fidèle de la personnalité d’Arman. Il s’agit donc bien d’un autoportrait. L’artiste veut également élever l’objet du quotidien et le déchet au rang d’œuvre d’art et dans le même temps dénoncer la société de consommation, qui surproduit et jette à tout va.

Enfin, l'oeuvre pose la question suivante : peut-on définir et connaître une personne par les objets qu'elle consomme au quotidien?"  source de l'article.

Exemple 3 : l'artiste américaine Cindy Sherman explore quant à elle, à partir de la fin des années 1970,  la piste de la métamorphose. Elle se travestit pour prendre l'identité, le temps d'une photo, d'une héroïne de film, d'un personnage de tableau...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Des dizaines d'artistes célèbres pourraient être encore étudiés pour parcourir cette thématique, je termine avec 2 derniers exemples, cela fera déjà beaucoup...

Exemple 4 : ORLAN

C'est une expérience extrême que nous propose cette artiste française atypique.

Elle se fait connaître dans le milieu de l'Art dans les années 1990 par un projet assez provocateur.

Après avoir étudié tous les codes de la beauté dans différentes civilisations, elle décide de transformer son apparence par la chirurgie esthétique afin d'adopter certains de ces codes : elle  fait ainsi sculpter son propre corps par des chirurgiens. C'est à la fois une façon de dénoncer les potentielles violences faites aux femmes pour s'obliger à correspondre aux "idéaux" de beauté imposés par une culture. C'est aussi une façon de revendiquer sa propre liberté, pour ressembler à ce qu'elle décide elle, sans justement dépendre d'un modèle imposé par une société.

Pose d'implants, limage des dents, recul de l'implantation de ses cheveux, scarifications diverses... le résultat sera jugé de votre point de vue certainement assez monstrueux.

Plus récemment, c'est grâce aux nouvelles technologies qu'elle poursuit ses transformations. Les déformations sont moins "douloureuses" puisqu'entièrement réalisées à l'ordinateur.

Série "SELFHYBRIDATIONS"

 

 

 

 

 

 

 

Exemple 5 : Samuel FOSSO

Après une enfance marquée par la guerre, Samuel Fosso ouvre un studio photographique à Bangui en République Centrafricaine et réalise des autoportraits sur les chutes de pellicules. "Le Chef" s’inscrit dans une série conçue pour les magasins Tati pour laquelle il endosse plusieurs identités. Le caractère baroque de l’image excède le simple exercice narcissique pour revêtir une dimension collective et critique. Fosso se moque ici des clichés occidentaux sur la représentation des chefs africains à une certaine époque. (Notice sur le site du Centre G. Pompidou).

 

 

 

 

 

 

 

 

Arrêtons nous ici pour les exemples. Le sujet pratique fait l'objet d'un article séparé, celui-ci étant déjà bien long :)

N'oubliez pas d'envoyer une photo de votre cours sur ma messagerie ENT lorsque vous aurez fini de recopier toutes les parties en vert dans cet article. Merci :)